Transfert de compétences


Notre État semble être devenu trop technocratique laissant plus de place à des réflexions techniques érigées par un système bureaucratique puissant plutôt qu’à des décisions souples faisant du sens au contexte.

Les mots de l’ancien Premier ministre, Edouard Philippe : « Il faut adapter » et savoir « reconnaître les différences » pour « préserver un maximum de souplesse » font écho. Dire cela, c’est assumer que l’État ne peut pas tout faire. Ainsi, nous devons envisager des transferts de compétences à la carte de l’État aux régions et revoir les relations entre l’État et les collectivités locales.

Ce qui est nécessaire, c’est d’avoir des décisions cohérentes, prises au plus près du terrain pour une approche adaptée à chaque territoire. Nous ne parlons pas uniquement ici de la gestion de la crise sanitaire, mais d’un problème bien plus global qui a des répercussions sur l’ensemble du système à des échelles différentes. Plus de liberté d’action pour les collectivités locales permettrait des réponses plus souples, rapides et adaptées. Un raisonnement qui s’applique également aux grandes entreprises privées.

Le monde évolue avec ses attentes, ses problématiques et ses solutions. Il serait illusoire de penser que notre époque est encore à l’uniformité de l’application des politiques publiques. Si cela a marché à une époque et nous a permis d’établir les bases solides d’une gouvernance après-guerre qui se reconstruit, aujourd’hui, la complexité du terrain et les nouveaux enjeux nous obligent à prendre conscience qu’un changement est inévitable.

Où placer le curseur de l’émancipation ?


Tout ne peut pas être décidé à Paris. Nous devons rebâtir de nouveaux équilibres dans les pouvoirs et les responsabilités et donner plus de liberté pour contrer la lenteur administrative de la prise de décision. Sans rentrer dans des mauvais débats qui fragilisent, il faut agir de part et d’autre, dans un état d’esprit constructif. 

Le Président l’a reconnu face à l’épidémie, les citoyens, les entreprises, les syndicats, les associations, les collectivités locales, les agents de l’État dans les territoires ont su faire preuve d’ingéniosité, d’efficacité, de solidarité.

« Libérons la créativité et l’énergie du terrain pour donner des libertés et des responsabilités inédites à ceux qui agissent au plus près de nos vies ».

L’objectif d’une politique décentralisée est de rentrer dans une logique d’efficacité dans la répartition des compétences, la lisibilité de l’action publique et la clarification des responsabilités fiscales.

Face à des situations différentes, doivent être apportées des réponses différentes dans un pays aussi diversifié que le nôtre. La solution ? Des outils particuliers développés à un endroit et pas un autre pour des réponses adaptées.

L’émancipation se trouve aussi dans le soutien aux initiatives, innovations et expériences.

Changer d’échelle

En Allemagne, un système qui fonctionne de manière moins verticale et plus en réseau a permis d’être plus réactif sur le terrain. Il est nécessaire de faire preuve de bon sens, de partir des besoins et des projets, et non d’une solution définie d’en haut et administrée de manière indifférenciée : un pouvoir vertical et descendant.

Nous devons nous unir autour d’une manière de travailler plus en réseau, plus collaborative qui donne des initiatives aux gens. Comme l’a montré la crise, ils en ont été capables vis-à-vis de solutions toutes faites. Face à des citoyens responsables, éduqués et informés, les décisions ne peuvent plus être administrées de la même manière et nous devons utiliser au maximum les intelligences humaines disponibles. Il faut donner la possibilité d’expérimentations provisoires à l’échelle locale pouvant devenir définitifs si l’idée semble intéressante : lancer des expériences de terrain pour, par la suite, en tirer les enseignements.

À l’échelle d’une entreprise


Acteur dans le secteur du BTP, nous constatons de près que les ordres font désordre. Face à la crise, des secteurs d’activité, dont nous en faisons partie, n’ont pas pu réagir de la même manière au sein des différents services de leur entreprise. Dans notre cas, chaque salarié n’a pas vécu le covid-19 de la même manière. Sur chaque chantier, nous avons dû prendre des décisions différentes et tout a bien fonctionné. Pourquoi ? Parce que nous nous sommes adaptés sans suivre les règles établies. Nous avons, avec les mesures de précautions nécessaires, pu prendre des décisions qui ont du sens à l’échelle de chacun.

Pour donner un exemple, au niveau de la construction, il y a eu un blocage important sur les permis de construire dont les signataires sont les maires, entre le 1er tour et le second tour des élections municipales. Ce blocage a eu des conséquences sur les autorisations et projets publics là où les villes auraient pu avoir le pouvoir de s’organiser par elle-même. Ce système centralisé n’a pas déverrouillé tout l’amont et le temps qu’il faut pour redémarrer provoque une latence énorme. Quand ça déraille en haut, c’est avec élan sur le bas. L’avantage du coopératif réside dans le fait que si une cellule va moins bien, elle est compensée par les autres. Tout est autonome.

Il faut que sur chaque projet, chacun puisse venir apporter ses compétences. Naturellement, en prenant ce qui fonctionne le mieux, le reste tombe en désuétude et le modèle final se construit ainsi. Tout le monde doit comprendre la finalité du projet pour avancer sur ses propres compétences, en ayant en vue le résultat. Il est important de ne pas appliquer des décisions uniformément, qu’il y est un enjeu ou non.